VISION
Nous nous nommons SAMBRE2030.
Ce nom est choisi d’une part en référence à la fenêtre d’opportunité internationalement reconnue pour tenter de préserver la planète du dérèglement climatique et de l’effondrement
de la biodiversité d’ici à 2030 et d’autre part
en référence au bicentenaire de la canalisation de la Sambre.
Nous sommes inspiré.e.s par un ensemble d’initiatives internationales
(Le Parlement de Loire, Bronx River Alliance, actions autour du fleuve Whanganui, Mar Menor en Espagne…) et motivé.e.s par l’amélioration de la qualité de l’écosystèmedes vivants autour de la Sambre, nous voulons obtenir d’ici à 2030 le droit pour la rivière Sambre d'obtenir la personnalité juridique et d'agir en justice via une action populaire, une représentation citoyenne, en vue de la défense de la qualité de vie de la communauté des habitants - humains et autres que humains - du bassin versant de la rivière Sambre. Notre vision doit se traduire de manière concrète par la création d’alliances favorisant l’émergence et la coordination d’actions concrètes
autour de la rivière SAMBRE.
Pourquoi une personnalité juridique ?
Cette approche juridique implique un faisceau de connaissances qui se décline au pluriel. Ainsi, notre projet permet de questionner notre rapport à la rivière SAMBRE par une multitude de couches qui sollicitent de nouvelles collaborations favorisant les approches subjectives et inclusives. Ces multiples "points de vue", à partir d'une vision qui n'est plus anthropocentrée, laisse place à un autre monde qui permet de nouvelles alliances. Selon le juriste David Victor, "c’est surtout l’article de Christopher Stone paru en 1972 qui marque le point de départ de la reconnaissance contemporaine de la nature comme sujet de droit". Christopher Stone, Professeur de droit inquiet du peu d’intérêt de ses étudiants pour ce qu’il raconte, s’empare de l’opposition d’un club de montagnard (le Sierra Club) à la société Walt Disney qui veut ouvrir une station de ski dans une vallée californienne riche en séquoias. La cour rejette la demande en arguant que le Sierra Club n’est victime d’aucun préjudice personnel. En réponse Christopher Stone écrira un article qui fera date : Les arbres doivent-ils pouvoir plaider ? Vers la reconnaissance de droits juridiques aux objets naturels ? Et si les arbres pouvaient défendre leur droit à la vie ? Pour compléter sa réflexion, Christopher Stone aura l’intelligence de convoquer l’histoire américaine en montrant que c’est le fait d’octroyer un nouveau statut juridique aux personnes racisé.e.s (et aux femmes) qui a orienté un nouveau regard sur ces personnes. C’est ce basculement juridique autour de la reconnaissance des éléments naturels comme personnalité juridique qui va permettre à celle-ci de passer du statut de chose à celui de sujet. Ce statut rend explicite la question de la réciprocité. C'est le fait de considérer la rivière comme une chose ou un égout qui a permis sa pollution. Depuis l’article de Christopher Stone, l’Équateur, en 2008, a conféré à la nature la qualité de sujet de droit. En 2010 la Bolivie a édicté une « loi sur les droits de la Terre mère ». En 2017 le fleuve Whanganui en Nouvelle-Zélande a acquis la personnalité juridique. En 2023, la lagune Mar Menor en Espagne (c’est une première en Europe) a accédé au statut de personnalité juridique.
SAMBRE
En tant que sujet de droit, la rivière n'est plus considérée comme une simple chose ou un « égout » mais comme un élément vivant, un sujet avec lequel nous sommes en relation de réciprocité. C'est pourquoi nous parlerons de Sambre comme un prénom et non plus de « la » Sambre comme un simple cours d'eau. Sambre coule sur 190 kilomètres entre Fontenelle en France et Namur en Belgique, sa confluence sur la Meuse. Elle fut la première rivière canalisée de Belgique. À certains endroits, l'industrialisation et le passé sidérurgique laissent des traces saillantes dans le paysage au point d'avoir détourné le regard d'une grande partie de la population de ce cours d'eau. La rivière est principalement utilisée comme une ressource liée à une exploitation industrielle. De plus, son image est liée à une forme de désenchantement économique, social et environnemental. Une rapide recherche sur plusieurs catalogues de bibliothèques en Belgique confirment cette image : on y parle de pollution de la rivière, de sa canalisation, des fortifications militaires et batailles le long de ses berges, et de la région qu’elle délimite partiellement, l’Entre-Sambre-et-Meuse. Dernièrement, le nom de Sambre est rattaché à une série télévisée qui illustre ce désenchantement autour du violeur de Sambre. Pourtant d'autres réalités existent !
L'origine du projet
L'artiste Olivier Pestiaux réalise en 2021 un voyage sur la Sambre et la Meuse, dans la région de ses origines, L'Entre-Sambre-et-Meuse. Ce voyage a été mené dans le cadre d’un projet artistique pendant le confinement en autonomie complète sur un petit voilier adapté pour l’occasion (avec un ami artiste Bernard Thiry). Un des moments importants du voyage sur le bateau fut l’entrée dans Charleroi, sa ville de naissance, par la Sambre. Il fut surpris de rentrer si brusquement dans un lieu connu et qu'il redécouvrait comme pour la première fois suivant un nouveau point de vue. Sambre l’accompagnait depuis Namur avec un sentiment d’une grande solitude. Alors que la Meuse semblait en connexion avec ses riverains, Sambre lui apparaissait désespérément seule et ignorée des habitant·e·s. Les maisons faisant dos à la rivière avec peu d'endroit public directement connecté à son cours. De manière précipitée et inattendue, ce sentiment de solitude se manifestait physiquement à Charleroi. Les personnes sur les quais à plusieurs mètres de hauteur semblaient indifférentes et ne remarquaient pas la présence insolite du petit voilier. Comment pouvait-on imaginer une ville qui vit de manière si déconnectée du cours d’eau qui la traverse et qui contribue à sa prospérité ? C’est ce constat qui a initié la démarche de SAMBRE 2030.
Crédits photographies ©Charleroi Métropole